« Tate Sensorium » : pourquoi la nouvelle salle de la Tate Britain va faire sensation
Apprécier une œuvre, dans tous les sens du terme
Aider les institutions culturelles à éveiller l’attention d’un nouveau public, tel est le but de Flying Object, agence cofondée en septembre 2013 par Tom Pursey et Tim Partridge. Très vite, l’entreprise rêve de l’IK Prize. « Son but est similaire au nôtre. Nous nous intéressons aussi à la façon dont la technologie peut améliorer la relation du public à l’art », commente Tom Pursey.
C’est ainsi qu’est né « Tate Sensorium », un projet qui offre une expérience multi-sensorielle au visiteur. Désormais, le public pourra non seulement voir, mais aussi sentir, toucher, écouter et même goûter une œuvre. Prenant l’exemple du tableau « Azalea Garden », que Patrick Heron a peint en 1956 dans les Cornouailles, Tom Pursey raconte comment le visiteur pourrait « sentir l’odeur des azalées, la sensation du vent sur la falaise, ou même les vagues qui l’éclaboussent ».
Pour concrétiser son idée, il équipe le visiteur d’un casque audio et utilise des sprays odorants. « Nous sommes encore en plein réflexion, notamment pour le toucher et le goût, mais le projet sera prêt d’ici l’automne », assure Tom Pursey.
« C’est la première fois qu’un dispositif convoque tous les sens en même temps », indique Tony Guillan, responsable de l’IK Prize. C’est pour cette raison que « Tate Sensorium » a remporté le prix face aux autres finalistes, qui proposaient d’exposer des œuvres imprimées en 3 D dans les rues de Londres, ou de trouver dans les peintures de la Tate des sosies des visiteurs.
De l’olfactif pour un public actif
Si la Tate a sélectionné le projet de Flying Object, c’est aussi parce qu’il renforce l’engagement de son public. Et ce d’abord, selon Tom Pursey et Tony Guillan, en facilitant la compréhension des œuvres. « Tate Sensorium » permet au public de s’immerger dans le tableau et de se mettre à la place du peintre », explique Tom Pursey.
Ensuite, Tony Guillan en est convaincu, « Tate Sensorium » stimule l’imagination du visiteur, notamment lorsqu’il est face à des œuvres abstraites. « Souvent, le public trouve l’art abstrait complexe, voire snob. « Tate Sensorium » libère sa créativité en le détournant des cartels ». Citant le tableau « Saint Martin-in-The Fields » peint par William Logsdail en 1888, Tom Pursey raconte que le public pourra vivre différentes expériences. En jouant sur les parfums, le visiteur pourrait se retrouver en marchand de jonquilles efflanqué ou en petit prince cossu et goûter à diverses émotions.
L’expérience ne s’arrête pas là : l’équipe de Flying Object propose aux volontaires de découvrir comment naissent leurs émotions, grâce à des capteurs électroniques capables de détecter les réactions provoquées par les œuvres. Les données sont ensuite analysées et partagées avec le public. « Nous voulons expliquer aux visiteurs comment leurs sens ont interagi afin qu’ils comprennent leurs émotions », déclare Tom Pursey.
La Tate Britain, un musée avant-gardiste ?
Si « Tate Sensorium » n’a pas pour objectif de « remplacer les œuvres d’art mais d’en révéler de nouveaux aspects », selon le mot de Tony Guillan, il conforte la place de la Tate au premier rang des institutions culturelles innovantes. D’abord, en revisitant la collection permanente du musée, à qui il donne une dimension plus ludique. « Les œuvres exposées paraissent parfois trop sérieuses ou trop complexes. Grâce au projet de Flying Object, nous montrons qu’elles sont aussi divertissantes » explique le manager de l’IK Prize. Ensuite, par le type de visiteurs que le caractère inédit de « Tate Sensorium » devrait attirer dans les couloirs de la Tate : les jeunes. Un public encore peu acquis à la cause des musées, mais friand de nouvelles expériences et très convoité par les institutions.
« Nous essayons d’être créatifs et nous expérimentons sans cesse » conclut Tony Guillan. Et ça leur réussit : l’année dernière, le projet lauréat « After Dark » avait rassemblé plus de 100 000 visiteurs sur sa plateforme en ligne. Son idée ? Inviter le public à prendre le contrôle de quatre robots équipés de caméras pour filmer les salles de la Tate Britain en-dehors des heures d’ouverture. Futuriste, vous avez dit ?
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